Paroles d’experts

Cessions de parts de société : quelles sont les opérations sociétaires soumises à autorisation ?

La loi « Sempastous » instaure un nouveau mécanisme de contrôle des cessions de parts de société détenant en propriété et en jouissance des terres agricoles. SCEA, EARL, GAEC, GFA, SA, SAS, SCI… Vous souhaitez transmettre des parts de société : êtes‑vous concerné par ce nouveau contrôle administratif et quelles sont les démarches obligatoires à effectuer ?

La déclaration préalable concerne la plupart des sociétés d’exploitation ou de détention foncière

Promulguée le 23 décembre 2021, la loi dite « Sempastous » a pour objectif de garantir la transparence et la régulation du marché sociétaire, pour favoriser l’installation d’agriculteurs, la consolidation des exploitations agricoles et le renouvellement des générations, tout en luttant contre la concentration excessive des exploitations et l’accaparement des terres agricoles. Depuis le 1er janvier 2023, toutes les opérations sociétaires doivent être déclarées en ligne (transparence). Il convient de notifier les cessions entre vifs, totale ou partielle, de parts ou d’actions de société qui détiennent, en propriété ou en jouissance, des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole ou détenant des droits dans de telles sociétés. Cela concerne les cessions de SCEA, EARL, GAEC, GFA, SA, SAS, SCI… à partir du moment où elles disposent de biens immobiliers à usage ou vocation agricole directement ou indirectement. La notion de vocation agricole fait référence au zonage dans le document d’urbanisme, à savoir les zones agricoles, naturelles, les Zones Agricoles Protégées ou les PAEN. La déclaration porte également sur les opérations de modification de la répartition du capital social ou des droits de vote de ces sociétés et qui aboutissent à transférer son contrôle (augmentation ou réduction de capital, fusion-absorption…).

Quelles sont les opérations concernées par une autorisation administrative ?

Les opérations qui se réalisent depuis le 2 avril 2023 et qui remplissent les deux critères suivants sont soumises au contrôle administratif (régulation) :
1. La prise de contrôle de la société : cette notion de contrôle s’appuie sur la définition du Code du Commerce relative aux droits de vote. Par exemple, si le bénéficiaire détient, à l’issue de l’opération envisagée, plus de 40 % des droits de vote dans la société et qu’aucun autre associé n’en détient au moins autant que lui, on considérera qu’il prend le contrôle de la société.
2. Les surfaces maîtrisées par le bénéficiaire : si son périmètre foncier dépasse le seuil d’agrandissement significatif de 120 ha en Nouvelle-Aquitaine, le bénéficiaire devra obtenir cette autorisation administrative avant de pouvoir réaliser l’opération.
Si l’opération ne remplit pas l’une ou l’autre de ces 2 conditions, ou si elle peut bénéficier d’une exemption, elle ne sera pas soumise au contrôle administratif, la déclaration sera réalisée pour information.

Le périmètre foncier du bénéficiaire prend en compte l’ensemble des surfaces déjà exploitées (en faire-valoir direct ou par bail) ainsi que celles exploitées par les sociétés dont il a le contrôle auxquelles on ajoute les surfaces en propriété autres, indépendamment de la nature de la propriété (pleine propriété, indivision, démembrement). On ajoutera dans ce périmètre les surfaces de la société concernée par l’opération. Afin de tenir compte des diversités des productions, on appliquera les coefficients de pondération définis dans le SDREA concerné, pour les productions végétales et animales en atelier hors-sol.

Les situations qui font exception à ce contrôle

Les opérations familiales, jusqu’au 4ème degré, seront exemptées à partir du moment où le bénéficiaire s’engage à conserver les titres pendant au moins 9 ans et à participer aux travaux d’exploitation, ou s’il s’agit d’une cession de parts de GFA par exemple, de mettre à bail au profit d’un locataire qui s’engagera à participer aux travaux pendant
au moins 9 ans. De même, les opérations entre co-associés ou co-actionnaires seront exemptées si les deux parties détiennent leurs titres depuis au moins 9 ans et s’ils participent effectivement aux travaux. Une dérogation est possible sur cette durée de détention pour le bénéficiaire si le cédant souffre d’une invalidité totale et définitive. Les donations sont également exemptées de contrôle ainsi que les opérations réalisées par la Safer dans le cadre de ses missions.

LA TRANSMISSION DES EXPLOITATIONS AGRICOLES SOUS FORME SOCIÉTAIRE

Au cours des 40 dernières années, les formes sociétaires se sont fortement développées en agriculture. Elles représentent aujourd’hui 40 % des exploitations agricoles et valorisent les deux tiers de la surface agricole utile en Nouvelle-Aquitaine. Elles sont utiles à la vie des exploitations, que ce soit dans la transmission progressive du capital à un repreneur familial ou pour du portage du foncier. La Safer Nouvelle-Aquitaine a développé l’activité de conseil pour accompagner leur transmission, avec notamment l’appui de deux juristes-fiscalistes.

Comment déclarer ces opérations sociétaires ?

Pour toutes les opérations sociétaires envisagées, les déclarations sont à effectuer sur le portail de télédéclaration national accessible sur le site www.saferna.fr dans la rubrique « Opérations sociétaires ». Il s’agit d’un formulaire sécurisé à remplir en ligne. Les opérations soumises au contrôle administratif devront s’acquitter de frais d’instruction de 360 € TTC. La Safer instruit les demandes d’autorisation, au nom et pour le compte de l’État. Elle analyse la contribution de l’opération au développement du territoire et si elle porte atteinte à des projets d’installation ou de consolidation d’exploitation du territoire. Elle transmet son avis au préfet du département du lieu du siège social de la société, qui prendra sa décision. Il pourra, à l’issue de la procédure (4 à 9 mois), soit autoriser l’opération avec ou sans conditions de mise en œuvre des mesures compensatoires, soit refuser la réalisation de l’opération.

Quelle sera la nature des mesures compensatoires ?
Le demandeur pourra proposer de vendre ou louer des surfaces qu’il a déjà en propriété ou qu’il aura à l’issue de l’opération. Il peut également proposer de libérer des terres qu’il a en bail. Ces surfaces seront orientées vers des projets d’installation d’un nouvel agriculteur ou la consolidation d’une exploitation agricole pour lui permettre de tendre vers le seuil de viabilité économique défini dans le SDREA. Enfin, il précisera les modalités financières de cette opération de compensation afin de s’assurer que ces conditions sont conformes au marché local.

Florence Rabier
Coordinatrice régionale de la régulation du marché sociétaire, Safer Nouvelle-Aquitaine
05 49 77 32 89
f.rabier@saferna.fr

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